ARNAQUE DES ANNUAIRES D’AVOCATS (SUITE) : LE CORBEAU ET LE RENARD

Posté le 15 décembre, 2015 dans avocats / advocacy

Ce blog a déjà évoqué en 2013 l’arnaque des annuaires d’avocats anglo-saxons aux noms pompeux qui nous inondent de sollicitations à publier des pages chères payées et dont l’utilité et les retombées sont strictement égales à zéro. Choisir de payer pour faire de la réclame dans un tel annuaire est évidemment licite tant du côté de l’avocat que de l’éditeur. Les méthodes de vendeurs d’aspirateurs induisant à souscrire le sont moins – mais passe encore. Si des avocats marchent dans la combine, c’est leur affaire et il ferait marrer que l’un d’eux crie s’être fait avoir. Mais les représentations faites aux souscripteurs – et au public – sont fausses. Ces éditeurs prétendent qu’il n’est pas possible d’être listé en payant, et que les avocats listés ont été sélectionnés sur la base de critères. La réalité est autre : ils ciblent les Etudes ayant la capacité financière ou le profil pour ressentir la nécessité de souscrire, les sollicitent sur l’alibi invérifiable et sans crédibilité de « peer references », et alors est-il payant et cher de prendre une page. D’autres annuaires vous incluent sans vous demander l’autorisation avec une description succincte, insérée à dessein dans un projet de « bon à tirer » entre les pavés de deux Etudes concurrentes ayant déjà payé pour insérer leur contenu rédactionnel naturellement étendu et dithyrambique. But de l’opération : vous faire souscrire à votre tour une pleine page dans laquelle vous mettrez aussi votre propre texte, par peur d’être exclu du club ou d’y apparaître moins bien vanté. Là où cette friponnerie dérape, c’est lorsque ces annuaires se mettent à établir des classements bidons et à publier des citations sur les avocats ayant payé des pages – que ceux-ci utiliseront à leur tour dans leur propre publicité. Ces procédés sont contestables. 

Les avocats sont vaniteux. Sans se souvenir de simplement La Fontaine, qui ne serait honoré qu’un prestigieux annuaire professionnel vous annonce tout d’un coup, après que vous ayez payé de chères pages pendant x années, mais ce qui naturellement n’a rien à voir, que vous êtes considéré avoir une first-rate mind, que vous êtes very intelligent, ou fantastically skilled. Les annuaires prétendent avoir recueilli ces « appréciations » de pairs, sans bien sûr jamais les publier ni que ce soit vérifiable – et c’est-là l’alibi du procédé. Certaines des citations sont tellement bateau et extraordinaires qu’il semble bien inimaginable qu’elles ne soient pas fabriquées si ce n’est même par un ordinateur… Les « rédacteurs » doivent bien s’amuser de décerner tous ces bons points simplistes à un public comblé de les recevoir – et encaisser ses souscriptions. Pour peu que tel avocat ait eu un fromage ou son dictaphone dans la bouche, Maître Renard s’en serait déjà emparé. Le procédé est à vrai dire tellement téléphoné et frelaté qu’il n’y a que celui qui s’y prête qui n’en rigole pas drapé de cette gloire tombée du ciel. Plus sérieusement, faire de la publicité est licite et utile pour une profession de services. Le faire ainsi est probablement contraire à la LLCA et à la LCD. Ces annuaires attribuent aussi des awards à des Etudes qui les affichent sur leur site Internet, papier à lettre, emails, etc. Là aussi il y a problème puisque ce ne sont que des estampilles arbitraires et liées à un service qui demeure payant – au contraire de certifications ISO ou autres processus indépendants qui sont vérifiables. Cela rend ces Etudes captives de leur page payante – ce qui pérennise l’arnaque mais trompe aussi le public.

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