Avocats, régulation et dérégulation – faut-il qu’ils soient soumis à la concurrence des non-avocats et cela est-il inéluctable ?

Posté le 22 décembre, 2011 dans avocats / advocacy

L’avocat jouit d’un monopole de la représentation en justice. Défendre en justice nécessite des compétences dont l’absence expose le client à un risque de dommage économique, moral ou autre comme la privation de liberté. D’où la réglementation de cette profession au titre de police économique, avec l’exigence de compétences acquises par une formation vérifiée par examen et une soumission à surveillance étatique. L’avocat est pour le reste confronté à une certaine concurrence d’autres prestataires de services s’agissant du conseil juridique. L’offre demeure toutefois limitée et la question fût ainsi posée (cf. la Lettre du Conseil de l’OdA de novembre 2003 ici) par Mario Monti lorsqu’il était commissaire européen à la concurrence il y a dix ans déjà : les exigences de qualifications des avocats en Europe sont excessives; elles portent atteinte à la concurrence et in fine au consommateur par le maintien de coûts élevés qui profitent à la corporation. En langage clair le consommateur ne doit pas être contraint de consulter et d’être exposé au coût d’un avocat ayant Bac + 6 et/ou un doctorat pour des services juridiques simples, un divorce simple, des litiges simples. L’offre ne doit pas se limiter à des prestataires sur-qualifiés armés pour les situations complexes mais comprendre des professionnels meilleur marché en raison d’une formation plus légère pour les situations simples. Pourquoi finalement ne pas confronter les avocats à la concurrence d’autres prestataires – y compris pour la représentation en justice ?

La question se pose en tant que ce monopole a des conséquences concrètes pour le consommateur : il limite l’accès de certaines couches de la population à des services juridiques simples et les en prive donc, il en résulte une inégalité sociale face aux problèmes juridiques ou à la vie juridique que l’Etat complexifie pourtant par la légifération, il privilégie économiquement indûment la corporation et gonfle la part du PIB consacrée aux services juridiques, soit au détriment de la compétitivité. Toutes les industries dérégulées ces dernières années ont diminué le coût des produits et services pour le consommateur sans nuire à leur qualité. Paradoxalement et pour ajouter au problème, l’inflation constante de régulation, si elle est, contrairement aux idées reçues, un facteur de prospérité et de compétitivité (lorsqu’elle ne crée pas d’atteinte à la concurrence – cf. Time – The Deregulation Myth – 14.11.11), profite également largement aux avocats puisque pour les acteurs économiques, se conformer aux régulations nécessite la consommation de services juridiques et entraîne un nombre accru de litiges (cf. WSJ Law Blog). D’où les attaques contre le monopole des avocats, qu’il s’agisse de distribuer des services juridiques grand public ou diversifiés à coût moindre et soumis à concurrence libre, de permettre à des non-avocats de détenir capitalistiquement des cabinets d’avocats, ou à ceux-ci d’employer également des non-avocats (cf. ce blog du 12 octobre ou des solutions/prestations juridiques online comme le site LegalZoom) – ce qui s’inscrit également dans la réforme universitaire de Bologne visant à permettre l’accès au marché du travail aux titulaires d’un seul Bachelor.

Pour ceux que cela intéresse sur ce sujet qui ne s’évaporera pas de sitôt, et sur l’ouverture qui interviendra nécessairement en la matière dans les années à venir, parce qu’elle est juste et appelée par la société et par ses besoins, la question est développée de manière intéressante dans un petit livre First thing we do let’s deregulate all the lawyers (cf. back cover ici et disponible sur Amazon).

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