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DÉSOBÉISSANCE CIVILE ET DUBITATIF DÉMOSTHÈNE

Extinction Rébellion et autres mouvements, qui veulent nous sauver tous du réchauffement et du massacre de la bio-diversité, prônent ou appliquent la désobéissance civile. Ce qui permet à tous les réacs du pays, politiciens ou non, de prendre tribune pour dénoncer l’illicéité, l’atteinte à l’ordre, le non-respect de la démocratie, etc. Facile, mais surtout bête et réducteur. Ghandi disait qu’y renoncer, c’est mettre la conscience en prison. Un parlement peut être mal avisé, et que ce soit démocratique et avoir le droit pour lui. Être gangrené par les lobbies ce qui atteint le processus démocratique, mais peu leur importe. Et la démocratie donne aussi des Trump, Bolsonaro, Duterte ou autres Kaczyński. Ce qui est essentiel, c’est qu’il y ait, dans chaque société, un degré de transgression, de désobéissance, de rébellion. Pas que chacun tue ou viole, bien sûr, mais que l’ordre social et l’ordre juridique respirent, avancent, que les idées et les extrêmes se confrontent – dans un degré raisonnable d’écoute, de respect et de pacifisme. Ce qui suppose que cet ordre social ait une cohésion élevée, soit l’opposé des clivages obtus et obscurantistes, mus par la peur et l’intérêt, que fabriquent ces milieux de l’ordre et de la droite réac. Une norme ne vaut pas par elle-même ou par la répression, mais par son degré d’adhésion. Une société sans rébellion ni désobéissance, sans confrontation, est une société morte et totalitaire. Qui ne progressera plus. Et c’est la polarisation qui mène au clash, à la rébellion violente, pas la désobéissance d’une société qui respire.

Démosthène, encore lui car il faut croire qu’on ne trouve pas plus près de nous, c’est un récent concours de plaidoirie à Genève – dont le sujet est lui aussi hélas lui aussi vieux et remâché : le procès de Dieu. Et c’est fou comme de jeunes juristes et avocats, au lieu d’être eux-mêmes, de parler vrai, avec leurs mots, leur âge, leur époque, quitte à emprunter parcimonieusement aux anciens pour le respect, pour le jeu, pour la forme ou supposément plaire au jury à cheveux blancs, se coulent dans un moule vieillot. Prennent de vieilles postures, adoptent un langage lourd et obséquieux, étouffé de poncifs. Il est possible d’afficher le respect pour le débat, les thèses, l’adversaire, sans être pompeux et hypocritement flatteur. Peut-être même Dieu accusé se porterait-il mieux d’être défendu de ses périls d’aujourd’hui dans le langage d’aujourd’hui. Le prétoire commande-t-il de parler ainsi, sur le ton – prétendu ou singé – de la déclamation ? Non. Est-ce le pupitre ou la robe ? Pas plus. Les plus belles plaidoiries sont parlées, parfois chuchotées, parfois sanglotées. Ou simplement restituées sur le ton de la conversation, de la simple narration, le fond tenant lieu de forme. Et en utilisant tous les registres de la diction et de la rhétorique, pas simplement un ou deux, ou toujours les mêmes. Démosthène est un beau mythe. Mais qui n’est nullement indispensable.