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Droit du sport : Tromperie dans le combat Pacquiao – Mayweather et ses conséquences, et la mort (brutale) annoncée du Third Party Ownership ?

Le boxeur Manny Pacquiao est sous le coup de plusieurs procès et class actions aux Etats-Unis : il aurait manqué à annoncer une blessure à l’épaule. Il risquerait ainsi une sanction sportive, en tant que les annonces officielles avant le combat n’ont pas été respectées. Mais les procès intentés contre lui visent bien plus large : il aurait ainsi trompé tous ceux qui ont payé pour voir la retransmission, et bien sûr les parieurs. Est-il inhérent à la boxe ou à tout autre sport d’être sujet à blessure ? Là n’est pas la question – mais bien dans celle, comme dans toute autre matière où des personnes se lient économiquement, de transparence, de conclure en bonne foi sur des représentations claires et exactes. L’ancien Procureur général du canton de Vaud, Jean-Marc Schwenter, concevait volontiers en privé qu’en cas de match truqué, il y avait escroquerie envers chaque spectateur – qui « achète » l’incertitude du match au titre de chose promise inhérente au sport. Idem bien sûr s’agissant des parieurs (autorisés seulement ?), des sponsors, des médias qui achètent les droits. Comme pour rappeler en marge des affaires FIFA actuelles que l’absence de transparence peut coûter cher – civilement et pénalement, soit à la mesure de la valeur économique des contrats en jeu. Dans la même ligne, l’UEFA et la FIFA avaient déclaré vouloir s’attaquer au Third Party Ownership [1], soit éliminer la faculté pour des tiers de « posséder » un joueur, et d’être rétribués pour sa cession.

Ce blog a plusieurs fois évoqué (ici [2] ou ici [3]) cette situation en réalité insoutenable – pour toute « propriété » quelle qu’elle soit sur un joueur. L’approche de la FIFA et d’autres instances et autorités ayant exprimé cette volonté (mais in fine assez mollement) est de trouver une easy way out. Soit de ménager, une fois de plus, les intérêts des clubs, agents, intermédiaires et investisseurs ayant actuellement des intérêts dans des joueurs. L’embarras est compréhensible : ces personnes et entités ont de tels intérêts, ils sont considérables, c’est un véritable système – et donc impossible de le déboucler d’un coup et sans autres sans causer des dommages importants à de tels partenaires. Mais ce qui rend du coup cette évolution quasi-impossible. De tels dommages seraient-ils actionnables ? La réponse est pourtant non. De tels accords sont, en droit suisse, contraire aux mœurs selon l’art. 20 CO. Ils sont donc purement et simplement nuls. Dura lex sed lex, tous ceux qui ont investi pour posséder un joueur sont donc entièrement à la merci de la simple constatation de cette nullité absolue – qui exclurait alors toute compensation ou restitution en vertu de l’art. 66 CO. Ainsi sont-ce plutôt ceux qui sont engagés dans de tels contrats négriers qui devraient avoir envie de les résoudre – davantage que, mollement une fois de plus, les instances concernées. En ont-ils la force morale ou simplement la bonne perception du péril ? Il est à craindre que non. On vous l’aura dit, ça peut péter grave.