Flash Trading et Dark Pools : (Enfin) à la caisse ?

Posté le 28 septembre, 2014 dans finance / eco

Ce blog s’est exprimé dès 2010 sur le flash trading (voir ce post et ses liens) – ces transactions et allers-retours en milli-secondes qui permettent à certains opérateurs équipés en conséquence de profiter des opérations de marchés effectuées par les autres. Il s’est ému également de la poursuite de Sergey Aleynikov, informaticien poursuivi pour avoir prétendument volé les codes des voleurs – qu’il avait développés. Plusieurs années après que les autorités aient laissé faire, après tout les grands opérateurs de marchés savent ce qu’ils font et sont de respectables entreprises, elles ont fini par s’y intéresser. En fait sous la pression d’un livre, Flash Boys de Michael Lewis. Si Michael Lewis le disait, c’est qu’il y avait probablement quelque chose à aller y voir. Soit le FBI, le Procureur de New-York puis finalement la SEC, qui pouvait difficilement ne pas sortir elle aussi du bois si le FBI et le procureur enquêtaient dans ses plates-bandes. La distorsion de marché fut très mollement contestée par certains et ces enquêtes vont leur train. Mais, mauvais temps pour ces opérateurs et les bourses de valeurs concernées, des fonds de pensions américains ont emboîté le pas et attaquent maintenant au civil en visant le statut de class action. Donc une responsabilité en milliards – qui s’ajoutera peut-être, probablement même, à de nouvelles sanctions des autorités qui viendront augmenter encore le total de 100 milliards de pénalités atteint cet été. Décodage – c’est le cas de le dire.

Le procès est introduit à New-York, bien sûr, par trois cabinets d’avocats agissant pour des fonds de pensions de Rhode Island et de Boston. Si la class action est accordée, il est aisé d’imaginer l’ampleur financière que ce procès atteindra. La demande de 136 pages allègue qu’en permettant aux flash boys de traiter par leurs systèmes ultra-rapides, et en leur permettant un accès plus rapide à l’information, les bourses visées leur ont donné un avantage illicite, soit de pouvoir traiter avant les autres à un meilleur prix. Les demandeurs devront prouver un dommage concret. Ce ne sera pas chose facile – même s’il est établi que les flash boys ont eux aligné des performances injustifiables autrement que par cet avantage. Comme toujours en termes de délits de marchés, le lésé a toute les peines à prouver sa propre lésion, puis le lien entre sa lésion et l’avantage illicite d’autrui. L’anonymat des transactions conclues électroniquement y participe. La répartition des réparations sera donc similairement difficile : qui a finalement perdu ce que les autres ont gagné ? Dans le cas d’autres abus de marchés, e.g. l’opération d’initié, le tricheur est puni in rem au profit de l’Etat – mais le perdant reste gros-jean comme devant. La demande attaque également Barclays pour l’opération d’une dark pool, soit un marché privé opaque sur titres qui pose pourtant d’autres problèmes non encore traités. Tout ceci est délétère – comment les opérateurs ordinaires de marchés peuvent-ils avoir confiance dans les transactions qu’ils passent si d’autres les exploitent systématiquement, à leur bénéfice et en impactant les cours ? C’est bien si une demande civile vient aussi mettre le sujet sur la table.

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