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Governing FIFA : Le rapport Pieth – remède de cheval pour grand malade ou politiquement correct et timide ?

La FIFA et ses nombreux « problèmes » notamment de corruption suscitent des réactions tout aussi multiples, du « tous pourris » aux résignés aux indignés aux indifférents tant que les matches ont lieu. La presse s’intéresse aux scandales lorsqu’ils sont scoopables, buzzables ou people-ish. Plus rarement aux problèmes de fond – et ainsi aux remèdes aux scandales tels que le rapport « Pieth » Governing FIFA [1] lequel vient d’être rendu public par la FIFA [2]. Alors, langue de bois, récupération, ou formidable challenge et réel pas en avant ? Le Pr. Pieth n’est pas suspect de complaisance en tout cas et ce rapport intéresse tout juriste qui s’intéresse au sport et/ou à la FIFA. In fine, tout cela est toutefois assez prévisible, poli, contenu. Sur les sujets comme sur le ton. Probablement parce que c’est un mandat qui vise à être constructif et non destructif ou accusateur. Un tel mandat ne postule que difficilement de dire à son client le « Cher Leader » que son système est pourri jusqu’à la moelle. La belle affaire donc que de dire qu’il faut éviter la corruption et « traiter » les zones dans lesquelles elle peut se manifester, que la forme juridique et la structure sociale ne sont pas adaptés à ce que la FIFA est devenue, ou qu’il faut éviter les conflits d’intérêts et instaurer éthique et bonne gouvernance. Mais en devant cependant bien admettre que ce que ce rapport identifie sont de vrais chantiers, concrets, énormes à l’échelle de ce qu’est la FIFA, et qui doivent dès lors connaître une réelle mise en œuvre. Bonne chance donc – car un échec serait difficilement acceptable même si certaines de ces réformes peuvent à l’évidence se heurter à des intérêts protégés, se perdre dans des processus décisionnels ou de discussion prônes aux blocages, voire à une absence de ratification. Pour le reste, ce rapport laisse en revanche très largement sur sa faim – sur des points qui ne pourront s’évaporer du débat même s’il était impossible de les adresser tous en même temps.

Par exemple que la FIFA et son armée de juristes respectent en premier lieu le droit, le droit positif, celui que tout le monde doit respecter. En Suisse lieu de son siège et ailleurs. Civil, pénal et administratif. Qu’elle abolisse des systèmes de qualification et de transferts de joueurs qui ne respectent pas le droit civil et notamment le droit du travail, en tant que tels et parce qu’ils engendrent des flux financiers occultes et injustifiables. Et les puissantes questions de fond. L’exemption fiscale se justifie-t-elle encore ? Le sport n’est-il pas un spectacle exploité en la forme industrielle sous l’alibi de son but idéal ? Comment résoudre la difficulté juridique structurelle que la FIFA doit régir le sport mais ne peut régir ni commander ses membres du fait que c’est de ceux-ci qu’elle tire son autorité ? Et sauvegarder l’unité qu’elle permet tout-de-même ? Comment refondre complètement un système féodal autocratique et verrouillé avec la langue de bois qui va avec en un système transparent et conforme aux standards actuels de gouvernance tout en maintenant une structure qui fédère 208 membres issus de cultures et de cultures juridiques très différentes ? Comment créer une culture d’accountability ? Comment obtenir l’appui de la justice et de la police – étatiques par définition – pour éliminer les commerces illicites ressortissant au crime organisé et qui gravitent autour du football en revendiquant simultanément être en marge du droit sur d’autres plans ? Comment sortir d’un amateurisme et d’une structure seigneuriale archaïque propice aux prébendes – alors qu’elle génère des milliards -, et s’insérer dans un système qui réponde à la fois aux triples réquisits du new public management, de la corporate governance and accountability et de l’Etat de droit ? Très vaste programme et ce ne sont pas que des mots, des concepts… Il serait bien que Governing FIFA en soit la première pierre – but which largely remains to be seen.