IDIOCRACY

Posté le 31 octobre, 2016 dans finance / eco

Idiocracy, au-delà d’un film que la postérité ne retiendra pas et d’une première acception de gouvernement formé d’idiots, signifie government that is based upon abstract theory. Et cela est intéressant et dans l’air du temps – car collant à la tendance naturelle à traiter un sujet de manière isolée, cadrée, scolaire. Que l’analyse ou le traitement soient bons, ou non, ils seront déconnectés de leur contexte. Ce travers, qu’appliquent avec soin juges, administration et politiciens, pensant devoir traiter des sujets pour eux-mêmes et dans un cadre limité, mène à des décisions injustes, inopportunes ou systémiquement incohérentes. L’actualité de la finance en offre des exemples sans cesse renouvelés. Dans le paysage d’un risque des grandes banques plus élevé qu’avant la crise, la Deutsche Bank, punie et amendée ad nauseam pour des violations du droit, du blanchiment aux taux d’intérêts etc. etc., est aujourd’hui un risque systémique concret. Alors qu’à nouveau les produits dérivés à son bilan en sont la cause, et nonobstant des régiments de comptables, auditeurs, risk managers et legal & compliance, il sera traité comme tel, techniquement, technocratiquement, isolément. Et, pour cette raison, sans aucune sanction des fautifs, qui pourtant existent, sur la base de règles sortant de ce cadre du risque systémique. Aux Etats-Unis, la vieille et honorable Wells Fargo a été prise la main dans le sac d’une fraude assez minable : avoir ouvert près de deux millions de comptes et comptes de cartes de crédit à des clients l’ignorant ou n’y consentant, et encaissé $ 2,6 millions de frais.

Son CEO a fait le numéro habituel de contrition devant le Sénat, ce qui devient presque honorant par la coulpe – alors que c’est la turpitude qu’il faut voir. La banque paiera, comme d’habitude, $ 185 millions de pénalités – pénalisant l’actionnaire qui n’y peut, sinon voter avec ses pieds, ce qui pénalisera les autres actionnaires qui n’y peuvent non plus. Aucune poursuite ni sanction – à cause de l’idiocracy. Elizabeth Warren, ex-future colistière d’Hillary, mais trop à gauche pour qu’un ticket féminin de gauche au large spectre ait eu ses chances, l’a redit à cette occasion : « The only way that Wall Street will change is if executives face jail time when they preside over massive frauds ». Ce qui est juste mais paradoxal puisqu’en matière de politique criminelle, la répression est mise en cause à plusieurs justes titres et que des milliers de gens sont en prison qui ne devraient y être. Mais ce qui serait précisément un déterrent efficace pour cette catégorie de délinquants parce qu’ils sont des cols blancs et acteurs éduqués et intégrés de l’économie et de la vie civile. Et ce qui pose la question de l’utilité, de l’efficacité des cohortes de pions censés prévenir les risques à tous les étages. Réponse par la comédie : dans Dirty Granpa, college movie regardable uniquement dans un avion, dans lequel Robert de Niro en grand-père graveleux dévoie son petit fils modèle jeune premier bourge beau et musclé (Zac Efron) au Spring Break à Daytona Beach, celui-ci précise à qui veut l’entendre qu’il est un lawyer et fait du SEC compliance. Même à Hollywood, tant pour le compliance et résultat garanti : foutage de gueule à chaque sortie. Spot On.

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