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JE HAIS LES CONTRATS

Il y avait ce film « Je hais les acteurs » dans les années quatre-vingt, parodique d’Hollywood dans les années quarante. En 2016 je peux répéter à qui veut l’entendre : je hais les contrats. Ou plus précisément beaucoup d’entre-eux et plus exactement les contrats anglo-saxons et les contrats soumis à des droits continentaux qui en reprennent le verbiage absurde. Et même si leurs défauts participent de la prospérité des litigators qui devront en régler les disputes. Certes il y a une différence fondamentale entre les ordres juridiques en ce que nous avons un droit des obligations là où l’anglo-saxon doit mettre dans son contrat ce qui en constitue les principes généraux. Ce qui avait fait l’objet d’un article plus sérieux de ce blog [1] en 2011. Mais franchement, des phrases de quinze ou vingt lignes, avec parfois cinq, six ou plus subordonnées en cascade, sont un cauchemar linguistique et un boulevard pour des difficultés de compréhension et d’interprétation. Elles sont aussi le signe d’esprits compliqués et serviles à un verbiage de pseudo-jargon reproduit par manque d’intelligence et de réflexion propre. Il n’y a pourtant aucune raison ni juridique ni linguistique à de telles formulations. Et encore moins dans un monde dans lequel précision et concision sont devenues essentielles. 

Après le défunt juge suprême Scalia ayant plusieurs fois vilipendé le jargon judiciaire, c’est au tour du juge d’appel Posner du 7ème Circuit de s’en prendre violemment à ceux qui ne s’expriment pas en anglais normal. Le jargon est opaque et prêtant à confusion. Il nuit à la compréhension des écritures, des jugements, et donc du processus par le justiciable. Il participe du clivage néfaste entre la population et la justice et le juridique. Ce qui peut être expliqué en jargon peut parfaitement l’être en langage ordinaire. Et de s’en prendre aux facultés qui l’enseignent comme pour perpétuer et protéger une prétendue « expertise » dont l’obscurité et l’archaïsme du langage n’est certainement pas la garante. Seul un article de 1992 cité par le WSJ Law Blog [2] semblait défendre le jargon en estimant qu’il n’était pas préjudiciable puisque l’essentiel était que les avocats de parties se comprennent ! Le langage juridique ne mérite toutefois aucune révérence propre. Son seul objectif doit être la clarté. Qu’il s’agisse de contrats ou de judiciaire. Je hais les contrats.