La décision de la Cour Suprême des Etats-Unis sur la mariage gay – en quelques mots et en lecture obligatoire (avec une cerise sur le gâteau ;)

Posté le 29 juin, 2015 dans justice

Impossible de ne pas en parler et lecture obligatoire pour toute personne férue de droit car elle est emblématique. Pas tant pour son objet, sujet de société s’il en est, mais parce qu’elle exacerbe la tension ultime mais basique qu’il y a dans un Etat de droit entre ce qui ressortit au judiciaire et ce qui ressortit au législatif. Sur un sujet divisant la société civile, cette Cour dite pourtant libérale se retrouve elle-même au summum de sa division : 5-4. L’enjeu et ce que représente ce jugement ne sont plus ainsi le mariage gay en lui-même. Etre pour ou contre, c’est faire appel réciproquement, confusément et simultanément, à la loi, au religieux, à la culture, à l’histoire, à l’affect, au vécu, à la politique. Soit inarbitrable selon ces critères. Pour les juges majoritaires, une liberté garantie par la Constitution doit s’imposer d’elle-même et sans recours au législateur, et même envers celui-ci : The dynamic of our constitutional system is that individuals need not await legislative action before asserting a fundamental right. (…) An individual can invoke a right to constitutional protection when he or she is harmed, even if the broader public disagrees and even if the legislature refuses to act. La Constitution est une création législative sujette à interprétation – et qui a préséance alors sur la seule loi. Mais le hic, c’est que cette interprétation devient créatrice, prétorienne, et que la frontière entre l’interprétation et la concrétisation de la Constitution, et l’acte de législation, s’efface. Pour les quatre juges ayant exprimé une opinion dissidente, cela n’a au contraire rien à voir avec la Constitution.

Pour le juge Roberts, [T]his Court is not a legislature. Whether same-sex marriage is a good idea should be of no concern to us. Under the Constitution, judges have power to say what the law is, not what it should be… (…) The fundamental right to marry does not include a right to make a State change its definition of marriage. And a State’s decision to maintain the meaning of marriage that has persisted in every culture throughout human history can hardly be called irrational. In short, our Constitution does not enact any one theory of marriage. The people of a State are free to expand marriage to include same-sex couples, or to retain the historic definition. (…) The majority’s decision is an act of will, not legal judgment. The right it announces has no basis in the Constitution or this Court’s precedent. (…) Finalement, cette controverse sur ce que la Cour peut ou ne peut pas faire prend donc le dessus en termes assez simples. Sa résolution, soit savoir si la majorité a interprété la Constitution dans le sens d’une liberté fondamentale qu’elle contient ou non, ou indûment fait acte de législateur, est laissé aux gloseurs : comme toute Cour Suprême, elle a le dernier mot.

Cerise sur le gâteau, elle ouvre aussi la porte à la polygamie, prenant directement appui dans les considérants de la majorité. Oui oui : It is striking how much of the majority’s reasoning would apply with equal force to the claim of a fundamental right to plural marriage. (…) If a same-sex couple has the constitutional right to marry because their children would otherwise “suffer the stigma of knowing their families are somehow lesser,”……why wouldn’t the same reasoning apply to a family of three or more persons raising children? (…) There may well be relevant differences that compel different legal analysis. But if there are, petitioners have not pointed to any. Il est très bien le juge Roberts ! Malgré des mots durs pour ses collègues – démontrant la division de la Cour tant sur l’objet de la cause que sur cette controverse constitutionnelle, il conclut : Understand well what this dissent is about: It is not about whether, in my judgment, the institution of marriage should be changed to include same-sex couples. It is instead about whether, in our democratic republic, that decision should rest with the people acting through their elected representatives, or with five lawyers who happen to hold commissions authorizing them to resolve legal disputes according to law. The Constitution leaves no doubt about the answer. A lire absolument.

 

 

 

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