L’avocat virtuel ou Etude virtuelle : Bon état des lieux dans un article dans la RDS

Posté le 24 août, 2014 dans avocats / advocacy

L’avocat virtuel, tout le monde en rêve – et encore plus en cette fin d’été qui n’est jamais arrivé : nous aimerions tous rester encore un peu en vacances ou partir quelque part le trouver enfin avant le retour au turbin, et donc rester virtuels encore quelques jours. Encore faut-il distinguer l’avocat virtuel, celui qui n’existerait pas en chair et en os mais dispenserait sous un nom de fiction des services juridiques en tant qu’interface de personnes physiques, l’avocat synthétique qui serait une machine, et la dématérialisation de l’Etude d’un véritable avocat. Ce blog a évoqué ces hypothèses (cf. ici, ici et ici) pour anticiper, ou fantasmer, les pratiques de demain. La question se pose assurément puisqu’un avocat québecois a intitulé de la sorte un portail de sources juridiques, et un autre au Québec toujours son site de conseils en ligne. Bien vu d’avoir bloqué cette URL. Il y a bien sur le second des photos d’humains pour rassurer, des figures très marketing/pub beau look bien coiffé dents blanches, mais c’est « un avocat », qui n’est pas nommé sur le site, qui « vous contactera ». Une étude sérieuse vient de paraître en Suisse sur ce sujet dans la Revue de Droit Suisse RDS-ZSR qui recèle d’excellents articles souvent hélas ignorés – c’est une de ces revues sérieuses qui passe malheureusement souvent directement du courrier aux rayons de la bibliothèque. Jérôme Gurtner vient d’y publier « Les études d’avocats virtuelles aux États-Unis et en Suisse. Réalité ou fiction? » (RDS 133 I cahier 3).

L’auteur examine avant tout le démembrement, la dématérialisation des Etudes, c’est-à-dire de l’infrastructure, à l’ère de l’électronique. Comment modifier l’outil de travail, bénéficier de l’informatique et des réseaux, augmenter la mobilité, baisser les coûts – et supprimer toute une partie des contacts aujourd’hui inutiles entre le client et l’avocat. Il examine la pratique américaine, existante, soit ce qui y a été considéré comme conforme aux règles du Barreau, puis ce qui serait praticable en Suisse. Certaines prestations juridiques peuvent être fournies en ligne sans que finalement la personne de l’avocat importe, même si cette idée nous perturbe ainsi que notre ego. Soit d’une manière quasi-virtuelle. De fait dans la pratique nombre de services et consultations, surtout internationales, sont déjà rendues par email sans que des avocats ou avocats et clients se connaissent ni ne soient jamais rencontrés. L’auteur évoque la nécessité d’un contact personnel au moins initial ou périodique dans certains types de mandats, et le risque que l’avocat soit abusé, utilisé, s’il ne connaît pas son client. Ou que l’avocat ne puisse plus s’assurer de l’adéquation de ses conseils s’ils ne voit pas son client en personne. Nul doute que certains mandats le nécessitent. L’auteur examine ainsi les exigences de la LLCA relativement à certaines de ces évolutions.

L’on peut se demander également ce qu’il en devient de l’exigence de l’inscription en un lieu, sur un tableau, pardon registre cantonal, dès lors que la technologie rend l’avocat mobile, qu’il peut être ici ou là lorsqu’il travaille, plaider ici ou encore ailleurs, et avoir ses dossiers et archives dans le cloud sur des serveurs bien ailleurs que le lieu de son inscription au registre, parfois même sans avoir aucune idée de où ses données sont stockées. Un célèbre confrère anglais reçoit dans le lobby d’un palace londonien les clients qui ne veulent venir le trouver dans la City. Un bureau luxueux et le meilleur marché de Londres me disait-il en riant : deux thés et quelques scones, même au tarif de palace, pour chaque heure qu’il y passe avec un client ! L’avocat doit bien répondre, administrativement et disciplinairement, en un lieu, puisqu’il exerce une activité soumise à autorisation. Mais pour le reste cherchez moi – il peut aujourd’hui effectivement être partout et nulle part. Ce qui peut être assez drôle en cas de perquisition par un de nos procureurs qui vient en personne en vélomoteur avec greffier et policiers. Plus sérieusement il y a là de véritables évolutions dans la manière de pratiquer de l’avocat et il sera intéressant de voir si elles sont exploitées – ou non et alors pourquoi.

 

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