Madoff : Mort des Common Law Claims du Trustee Picard et pas de Clawback extraterritorial non plus

Posté le 8 juillet, 2014 dans finance / eco

Deux décisions importantes en sept jours. Le 30 juin, la Cour Suprême a refusé de se saisir de l’appel du Trustee Picard contre l’arrêt de la Cour d’Appel du 2ème Circuit ayant confirmé la décision de première instance de rejeter les actions en dommages-intérêts qu’il avait intentées contre HSBC, UBS, Unicredit et autres acteurs de la chaîne. Picard faisait valoir ces Common Law claims qui ne sont pas des créances de droit de la faillite mais des prétentions appartenant aux victimes plutôt qu’à la masse. Picard n’augmentera donc plus le dividende de faillite de BMIS par ce biais. Les victimes de Madoff peuvent toutefois agir individuellement, ou les Feeder Funds eux-mêmes, et certains le font, contre ces opérateurs ayant fauté. Mais cela est cher, long, compliqué, et en réalité inaccessible pour des victimes individuelles. Cela tire donc d’affaire ces banques et ces opérateurs. La tentative de Picard présentait l’intérêt de les mettre en cause là où elles ne le seront plus réellement ou de moindre manière, par une sorte d’action collective sur un fondement valable de leur responsabilité pour avoir permis à Madoff de commettre sa fraude. Case closed donc. La seconde décision est celle du juge Rakoff d’hier de dénier à Picard la faculté de poursuivre en Clawback les investisseurs étrangers n’ayant pas eu de relation directe avec BMIS. Et elle est très importante.

Avec celle du Privy Council du 16 avril selon laquelle les Feeder Funds anglo-saxons n’ont pas eux-mêmes non plus de titre juridique pour se retourner contre leurs investisseurs ayant retiré des avoirs avant la découverte de la fraude, c’est un sérieux pas de plus vers la fin de la contrainte qu’exercent sur ce point nombre de banques suisses sur leurs clients – au titre de leur exposition hypothétique à ce Clawback. Comme déjà commenté, le juge Rakoff a déjà jugé que le Clawback s’étend sur deux ans et uniquement sur les profits fictifs – sauf mauvaise foi de l’investisseur au moment du retrait. Ce qui en limitait déjà singulièrement la portée. L’arrêt de la Cour d’Appel est à rendre sur ce point. Le juge Rakoff vient maintenant de juger que le droit des faillites américain et le Securities Investor Protection Act n’ont pas d’application extraterritoriale, et ne permettent donc pas de faire valoir un Clawback sur un transfert entre un Feeder Fund étranger et son propre investisseur étranger. Le juge relève, outre que la loi ne prévoit pas une telle portée et qu’elle se heurterait au droit international, que cette solution est cohérente avec le fait que, précisément, ces investisseurs indirects n’ont pas qualité ni de créance dans la faillite de BMIS – mais uniquement via le Feeder Fund concerné. Si le Clawback peut, en droit interne américain, s’exercer contre le secondary transferee qui a reçu des biens du failli, il n’en va donc pas de même si le primary transferee et le secondary transferee sont à l’étranger.

Cela exclut donc tout Clawback en faveur de la masse en faillite de BMIS contre des investisseurs de Feeder Funds, ces fonds restant en revanche, en tant que clients directs de BMIS et créanciers dans la faillite, soumis au Clawback – selon la portée finale que lui donnera la justice américaine. Dans la règlement global de l’affaire Madoff, tout ce qui contribue à augmenter le dividende de faillite de BMIS est bienvenu pour toutes les victimes de la fraude. Pour autant bien sûr que le droit le soutienne. Il est injuste à certains égards que des investisseurs ayant retiré des profits fictifs puissent les conserver à la faveur des décisions précitées, même s’ils étaient de bonne foi. In fine ils ont empoché l’argent escroqué aux autres victimes. Pour autant, les motifs qui mènent à ces solutions sont, comme également commenté, donnés et juridiques. L’essentiel est au reste d’avancer.

 

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