PRINCE – IMMENSE ARTISTE MAIS PAS PRETEUR

Posté le 5 juin, 2016 dans divers

La mort de Prince (ici en photo à 19 ans) a été pleurée, son oeuvre saluée, mais finalement pas plus que ça. Artiste incroyable mais fantasque et somme toute inclassable. Qui se voulait violemment être le premier et vivait violemment sa rivalité de fait avec Michael Jackson – alors qu’ils étaient simplement totalement différents en tout. Et qui devait un certain isolement à sa propre attitude et au fait qu’il ne jouait pas entièrement selon les règles du « premier marché » musical. Guitariste et compositeur hors-pair (pour d’autres également dont le magique « Manic Monday » des Bangles), excellent metteur en scène de son propre personnage – et de quelques films, Prince a rythmé trois décennies par ses mélodies et ses textes magnifiques, poétiques, évocateurs, rock, en jouant de toutes ses facettes, de sa ressemblance avec Hendrix comme de ses traits propres, de la frontière entre les sexes. Mais au plan juridique, Prince était très à cheval avec ses droits d’auteur – pour ne pas dire un emmerdeur. Il ne les défendait pas simplement lorsqu’il le fallait, comme d’autres. C’était un pan entier de son activité d’artiste comme les multinationales défendent leurs marques et brevets de manière concertée et industrielle. Tout le monde se souvient ainsi de la vidéo publiée sur Youtube d’un tout petit enfant dansant sur la musique de Let’s Go Crazy diffusée dans un magasin vue des millions de fois… attaquée en justice par Prince !

Cela a fini devant la Cour d’appel du 9ème Circuit qui a finalement jugé que Universal n’avait pas évalué si cette « utilisation » de la musique jouée dans un magasin était abusive avant de demander son retrait d’Internet – contrant de fait la position de principe de Prince et d’Universal que son contenu musical ne pouvait être simplement repris sans leur accord et que cela ouvrait leur droit à un jugement direct. Cette affaire a toutefois dépassé le statut d’incident de violation d’un droit d’auteur. Un groupe de pression, la Electronic Frontier Fondation, est venu à la rescousse de la mère du pauvre bambin – pour plaider que de courts segments d’oeuvres protégées peuvent être utilisés à des fins récréatives, de critique, d’évocation, ce qui participe de la liberté d’expression, du « fair use ». Cette affaire a également mis en lumière que les équipes d’Universal traçaient et combattaient même des extraits de Prince de quelques secondes sur Twitter ! Maintenant hélas mort et enterré, Prince, qui avait pourtant bouleversé les modèles d’affaires de la musique en offrant un nouvel album gratuit dans un grand quotidien, aura donc également laissé un héritage juridique quant à la ré-utilisation numérique des oeuvres. Sacré mec. Let’s Go Crazy.

 

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