SANCTIONS INTERNATIONALES – LE PEU D’INTROSPECTION SUR UN ACTE DE GUERRE

Posté le 18 septembre, 2018 dans actu / news

Sanctions internationales. Le terme sonne sérieux. Des Etats, ou par l’entremise d’organisations internationales, en « sanctionnent » d’autres. La sémantique est claire : sanctionner, punir, contraindre. Pour quelles raisons ? Elles varient dans un champ très vaste, de la peur physique, militaire d’un ennemi, à ses pratiques commerciales. Pour protéger son économie, les peuples, le sien ou le leur, la planète, ou induire un changement de régime craint ou désapprouvé. Les Etats les exécutent, parfois en en étant le moteur, parfois par solidarité, adhésion ou consensus, c’est-à-dire envers ses causes et ses effets. Parfois de mauvaise grâce ou par contrainte eux aussi. Dans un monde manichéen, il y a des camps, des bons, des mauvais. Et des lois qui sanctionnent à leur tour, pénalement ou administrativement, les particuliers et les entreprises qui violent des sanctions édictées. En ce que les sanctions sont un succédané de guerre, constituent de la contrainte physique, elles présentent l’avantage d’éviter, précisément, la guerre. Mais elles sont tout de même un acte de guerre – et en ont une partie des effets pour les populations des pays visés.

Le problème du débat est qu’il est trop varié pour être théorisé : confectionner des armes de destruction massive est à des lieues d’une pratique commerciale dommageable ou d’être, simplement, un régime honni, violant les droits de l’homme, ou dans lequel le divin est instrumentalisé à des fins belliqueuses. En tout cas est-il politique, avec toutes les exceptions et leurs accommodements, injustes ou plutôt arbitraires, envers d’autres intérêts. Souvent peu démocratique. Parfois risible ou caricatural. Que penser alors de la saisine de la Cour de Justice Internationale par l’Iran contre les sanctions récemment ré-instaurées par les Etats-Unis ? Certainement une manoeuvre de com. intéressante – mais à quoi bon soumettre un acte de guerre, visant ouvertement à susciter un changement de régime ennemi par l’ostracisation et la contrainte économique, à un tribunal ? Et les Etats-Unis respecteront-ils la décision de ce tribunal, a fortiori qu’ils s’en prennent à nouveau, pour des raisons politiques, à la Cour Pénale Internationale – dont ils partagent pourtant sur le papier toutes les valeurs théoriques ? Et, si l’Iran biaise, viole ses autres engagements et poursuit des fins occultes, pourquoi lui permettre de profiter des valeurs qu’une instance judiciaire représente, dont il abuserait alors ?

La réponse est qu’il faut cependant l’accepter et le louer. L’Iran répond par un acte conforme au droit international, conforme au progrès, conforme à la mission des organisations internationales, conforme à l’objectif d’éviter la guerre. S’il biaise ou a tort, il ne faut pas présager que l’instance à laquelle il s’adresse ne puisse l’identifier, ni le dire. Les désaccords entre Etats puissants ont de nombreuses strates, affichées ou secrètes. Cette saisine de la Cour est un coup d’échecs parmi de nombreux au sein de ces strates. Mais elle est juste – car comme la guerre elle-même, les sanctions internationales n’échappent ni au droit, ni aux droits de l’homme – dont celui de l’accès à un juge impartial et indépendant. Si cet accès vise à éviter la justice propre, et donc la violence inhérente au déficit d’Etat de droit, au plan interne, il n’y a pas de motif de raisonner différemment au plan international. Un peu de judiciarisation ne fera pas de mal au déficit de démocratie dont souffrent souvent les décisions de décréter ou de suivre des sanctions.

 

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