SEC/Citigroup/Rakoff – une affaire de principe également en matière de surveillance des marchés

Posté le 11 janvier, 2012 dans finance / eco, justice

Cette affaire est également importante en termes de surveillance des marchés – de policy sur ce point. Et mérite donc de s’y attarder. Au plan judiciaire (cf. dernier post) le juge a refusé le settlement pour les raisons évoquées de ne pouvoir apprécier sa justesse, soit au plan de son pouvoir et de son devoir de contrôle de l’accord passé, en justice précisément, entre la SEC autorité de surveillance et la banque poursuivie. Dans les faits, Citigroup a effectué un gain de $ 170 millions en pariant contre le produit qu’elle avait vendu à ses clients – lesquels ont perdu $ 700 millions sur celui-ci. Est-il admissible que la société poursuivie accepte de transiger cette poursuite pour $ 285 millions alors qu’elle ne reconnaît – mais ne conteste – les faits, ni qu’aucun organe ni employé ne soit sanctionné ni même cité ? Cela constitue-t-il un message admissible pour le marché, ses acteurs, les investisseurs – soit en termes de surveillance des marchés ? C’est également cela qui est en jeu dans cette affaire et chacun peut voir midi à sa porte.

Pour certains la SEC extorque ainsi des sociétés cotées qui paient cette dîme de temps-à-autres en la considérant comme une sorte de prix à payer pour jouer et alors même que l’une et l’autre estiment qu’elle gagneraient en cas de procès. Et cette dîme un prix à payer pour continuer une entreprise quasi-criminelle : rouler le chaland tant que l’on ne se fait pas prendre, soit le reste du temps. La SEC et d’autres y voient au contraire une forme de justice efficace et concrète – puisqu’elle conclut de tels accords régulièrement ensuite d’ouvertures d’enquêtes de droit de la surveillance et encaisse les montants conclus. Cela alors qu’elle est insuffisamment dotée pour mener par hypothèse chaque enquête au procès. Mais avec le résultat insatisfaisant prudentiellement et moralement que la majorités des violations des règles de marché poursuivies se concluent sans « culpabilité », sans admission de responsabilité, et sans le message que cela comporterait – alors qu’elles sont réelles. Et minant ainsi la confiance du public en un marché dont les acteurs ne sont pas exposés à une réelle accountability.

En fin de compte, le juge Rakoff s’oppose donc à une pratique qui consiste à dire que l’on n’a rien fait de mal, que l’on ne recommencera pas, et à payer tout de même une somme d’argent. Au plan judiciaire, une décision soumise au juge pour entérinement mais dont il ne contrôle pas les faits ni la subsomption est problématique – et donc dangereuse. Au plan de la surveillance, une telle pratique est insatisfaisante en termes de policy, de message au marché, et devient un outil de pression sans contrôle concret. Pour ceux qui trouvent que c’est cette décision qui est contestable, elle revient à laisser le juge dicter son attitude à une agence fédérale, à l’obliger à poursuivre là où le pouvoir de contrôle du juge doit se limiter à refuser les accords qui ne sont pas dans un intérêt public au sens large. Soit in fine une violation de la séparation des pouvoirs, transformer le juge en autorité de surveillance – ce qu’il n’est pas. Pour d’autres encore, c’est au législateur qu’il appartient de déterminer la latitude de l’autorité de surveillance. Les questions de policy n’appartiennent pas au pouvoir judiciaire – même s’il est confronté à des défaillances de l’autorité sur ce point.

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