Les nouvelles technologies bio-électroniques sont le plus souvent évoquées dans le cadre de l’aviation militaire (head up display avec interaction rétinienne), de la médecine (transferts de données métaboliques par capteurs dans ou sur le corps), de la circulation routière (détections des réactions cérébrales) ou encore, plus près de nos activités les commandes vocales de programmes informatiques ou simplement de téléphones mobiles. La commande par le cerveau [1] est également désormais une réalité, par exemple la détection des impulsions électriques cérébrales pour commander un muscle ou un robot. De telles applications sont pourtant rarement envisagées pour une profession comme la nôtre souffrant d’une image désuète – l’avocat avec son code civil, son bloc et son crayon ou sa plume, de poussiéreux dossiers en carton fermés par un ruban en tissu. Et deux fauteuils devant son bureau pour ses clients humbles et désemparés devant tant de science et de réconfort. Une application technologique nouvelle nous est toutefois bientôt destinée, pour cet été, ainsi qu’à d’autres professions de services : l’établissement du time-sheet par la pensée. Révolution donc dans un métier dans lequel le time-sheet est roi, seul indicateur fiable pour certains, prime à ce que l’avocat travaille pour d’autres, prime à la lenteur pour d’autres encore.
Fini le travail fastidieux de devoir noter scrupuleusement le temps passé sur tel ou tel dossier, ou le saisir dans un software pour avocats tous aussi mal fichus les uns que les autres (les bons informaticiens travaillent visiblement pour Nintendo ou PlayStation et ce doit vraiment être les plus nuls qui conçoivent les programmes pour avocats !). Finie la difficulté de savoir combien de temps nous avons travaillé sur un dossier – en ayant été interrompu dix fois par une irruption de quelqu’un dans notre bureau, des e-mails ou des appels téléphoniques. Fini le pensum du secrétariat de devoir retranscrire ou saisir le time-sheet. Fini le doute jamais dissipé du client de savoir si l’avocat a réellement travaillé toutes ces heures sur un dossier pourtant si simple, ou s’il n’a pas regardé de longues minutes par le fenêtre en soupirant ou pensé à sa liste de courses à faire en rentrant. Ce nouveau software compute directement le temps consacré lorsque l’avocat y pense – pour autant que le dossier ait une référence dans le système à laquelle il puisse rattacher les impulsions cérébrales. A la fin de la journée, le chronomètre sera certain, traité et comptabilisé. Ce système révèlera-t-il plus ou moins d’heures que facturées « manuellement » ? Sera-t-il économiquement favorable ou défavorable à l’avocat – et inversement au client ? Les tests sont en cours et les conclusions seront publiées bientôt.