L’article 305bis CP comme norme de protection d’intérêts particuliers – des précisions bienvenues du Tribunal fédéral, titrait le CDBF le 17 décembre suite à l’arrêt 4A_603/2020. Dans la ligne de celui de la Poste (ATF 142 IV 333) qui avait exigé une identification des comportements délictueux individuels, cela se tient dans une optique pénale et de lege lata. Le Tribunal fédéral exclut ainsi de considérer une faute de la banque. Il exige que le demandeur apporte la preuve d’un comportement particulier de blanchiment, à charge, s’agissant d’une commission par omission, de personnes soumises à des obligations fixées par la LBA. Il faut donc également prouver leur intention délictueuse. Le résultat est toutefois clair : si l’art. 305bis CP protège aussi des intérêts particuliers, cela restera théorique.
Il n’y aura jamais en effet de situation dans laquelle une banque sera condamnée – faute pour un demandeur civil de pouvoir disposer de ces éléments. In casu, les faits établis retenaient une carence de la banque face à des anomalies graves de la relation bancaire – laissant présumer un crime préalable, et partant un blanchiment comme l’avait jugé la Cour cantonale. L’approche du Tribunal fédéral revient donc à protéger la banque dans une situation dans laquelle elle a fauté, laissant les lésés sans protection. Des précisions bienvenues ? Uniquement pour la banque, donc.
Un autre arrêt récent 4A_407/2021 a soulevé des critiques – fondées. Lorsque des actes de disposition sont exécutés sans droit par l’employé d’une banque, le client doit pouvoir réclamer le solde de sa créance ou ses valeurs mobilières sans comptabilisation des opérations illicites. Soit, par une action en exécution. La banque est en effet gardienne de ses avoirs : c’est à elle qu’il incombe de justifier, et en justice d’alléguer et de prouver, toute instruction dont elle estime pouvoir se prévaloir. Or le TF revient sur cette approche et considère que le client doit exercer une action en dommages et intérêts sur le fondement de… la gestion d’affaires sans mandat. Ceci est proche d’être juridiquement incompréhensible. Surtout et une fois de plus, cela déplace le fardeau de la preuve et de l’allégation sur le client. Cela est injustifiable vu les difficultés pratiques et procédurales qu’il a à affronter pour obtenir les informations et documents nécessaires pour formuler sa prétention, là où les faits générateurs de la responsabilité de la banque se situent en son sein. La pratique, que la jurisprudence illustre, est que les banques résistent aux demandes en ce sens du client – qui doit alors naviguer entre une reddition de compte préalable qui prend le temps d’une procédure ordinaire et est coûteuse, et/ou une requête de preuve en procédure constituant elle aussi un litige interlocutoire long et coûteux.
Cet arrêt protégeant une fois de plus la banque, la partie forte au contrat et régulée, envers le client, la partie faible au contrat et consommateur, se situe dans un biais systémique qui, année après année, ne laisse de choquer.