- Revolawtion - https://www.revolawtion.ch -

La campagne de Romney (comme d’autres mais plus encore) comme illustration de certaines inefficiences ou limites de la démocratie

Nos sociétés occidentales sont des Etats de droit démocratiques. Et ce blog ne répète jamais assez le privilège, l’acquis historique que cela constitue, mais aussi sa fragilité ou son absence de pérennité garantie. Il est facile ainsi de pointer les déficits d’Etat de droit et de démocratie dans d’autres Etats ou sociétés. Mais également chez nous. Ainsi l’alternance à la française ou à l’américaine, l’existence de deux blocs politiques majeurs en opposition constante et gouvernant tour à tour ou ensemble en cas de cohabitation, sont-ils une concrétisation de la démocratie. Ils permettent l’alternative et l’altérité, un contrôle réciproque de chaque bloc, et donc un choix véritable mais qui n’est que modérément libre. La logique de deux blocs limite le choix à deux axes principaux. C’est sans comparaison avec un régime totalitaire ou unique s’imposant à l’ensemble, mais constitue tout de même une restriction par alignement nécessaire sur le consensus interne à chaque camp. Quant aux choix des élus, de l’exécutif ou du législatif, il est dans la plupart des systèmes également limité, soit à un panel de politiciens de carrière ayant eu la persévérance de faire toute la filière ou tout le cursus, parfois par conviction, parfois par défaut. Soit un choix en réalité très limitatif. Seule la démocratie participative et la démocratie directe, mais qui ont a aussi leurs limites, permettent d’atténuer ce défaut. Dans un système bi-partite, l’événement d’une campagne telle que la présidentielle américaine est ainsi un phénomène très particulier en termes de contenu politique.

Alors qu’en cours de mandat les débats politiques possèdent contenu, une certaine profondeur et technicité, une campagne voit au contraire les positions se recristalliser autour d’axes secondaires et moraux, autour de postures constituant autant de courants et de poids et influences au sein du parti/bloc. Cet inventaire des rapports de force électoraux internes pollue et dénature le débat. Il le détourne des enjeux courants et concrets par des positions et pétitions de principes sur des points ne constituant pas un enjeu réel. Il sollicite des courants et influences par des compromissions qui ne seront pas tenues. Il bêtifie enfin le débat par un repli strictement nationaliste – comme si chaque camp était d’un coup et comme argument imparable le temps de la campagne plus patriote et plus à même, le seul à même de sauver le pays ou de défendre vraiment ses intérêts. Cette dérive est caricaturale aux Etats-Unis et en France, a fortiori adossée au slogan simpliste du « changement » comme si ce seul mot suffisait ou valait programme politique. Ainsi la campagne en France a-t-elle recensé dans la bouche de chaque candidat d’innombrables propositions ou positions tout simplement contraires au droit, irréalistes et qui ne seront naturellement pas tenues. Ces dérives font la part belle au simplisme, à la pauvreté politique et à l’absence de clarté du contenu – ce qui est précisément regrettable au moment du choix. Et une inefficience de la démocratie. Remède à cela ? Sortir de ces carcans de campagne – et de la dictature des conseillers et sondages continus sur ce contenu simpliste ? Pas simple probablement – mais au moins y songer.