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La Suisse enfer fiscal – et autres salades sur le sujet

Les questions de fiscalité auxquelles la Suisse est confrontée au plan international ou intérieur sont une grande salade. Des pleurnichages de la place financière au nouveau parti bourgeois démocratique dont l’un des arguments aux élections cantonales était de créer un fonds de cent millions pour les entreprises (ayant vite compris que le politicien populaire est celui qui dépense l’argent des autres), il y a vraiment de tout. On ne pleure jamais pour les plus riches que soi mais la Suisse est un enfer fiscal – pour certains. Un avocat indépendant marié ne sortant pas de la classe moyenne supérieure atteint avec l’AVS un taux de prélèvements directs de 51%. C’est trop. La formule selon laquelle il travaille jusqu’au 30 juin pour payer les frais généraux, salaires, loyer et infrastructure, jusqu’au 30 septembre pour l’Etat, et du 1er octobre au 31 décembre pour lui, est malheureusement vraie. C’est excessif et injuste – eu égard à certaines autres situations. Cela explique en une phrase pourquoi le forfait fiscal est condamné : cela énerve de payer plus que le voisin au forfait plus riche que soi. A fortiori qu’il a distordu le marché immobilier en pouvant payer, avec son économie d’impôts, une prime que le marché ne justifie pas et que le contribuable ordinaire ne peut pas payer. Les rulings fait à certaines entreprises procèdent de la même injustice. Genève est pour les autres déjà à la limite supérieure quant à la motivation que le rapport entre charges et prestations doit entretenir dans l’économie privée. Pour le reste il est amusant que trois des derniers véhéments pourfendeurs du secret bancaire suisse soient rattrapés par la mauvaise fortune : comme d’Amato avant eux, Sarkozy est empêtré dans plusieurs affaires judiciaires dont de financement, son laquais M. Woerth pire encore, et Peer Steinbrück est poussé sans gloire vers la sortie. Il doit y avoir une malédiction à s’attaquer à la Suisse.

Dans cette salade son lot de clowns et stupidités. Falciani se répand pour regretter que Bercy ne fasse de tapis rouge à son projet de « cellule de défense » économique et l’immobilisme de certains ministères. Se vendant comme un chevalier blanc, il oublie qu’il est un voleur, prévenu pénalement, et qu’avant que sa liste ne soit récupérée de fait par les autorités françaises, il a vulgairement essayé de la monnayer. Condamin-Gerbier l’homme qui savait tout a eu ses quinze minutes de célébrité Warholienne en France avant d’aller méditer ses affabulations dans une tôle suisse. Le mettre dedans pour espionnage économique, il fallait oser mais ça se tient et c’est assez drôle, et ça a fait râler en France ce qui est toujours bon dans le bras de fer actuel. Et pendant qu’une petite partie des petits poissons se pressent pour se régulariser avant que le ciel ne leur tombe sur la tête, les gros sont partis ailleurs leur cigare aux lèvres et la France affine son système répressif en visant à alléger les peines des fraudeurs qui balancent leurs complices. Belle moralité donc – mais tout ça ça mène où ? Apparemment le monde civilisé avance tout de même en marche ordonnée vers une fiscalité plus efficace, et donc plus égalitaire, sur les chapitres principaux des revenus de l’épargne, du statut des entreprises multinationales et de la taxation au lieu réel de la valeur ajoutée. Les politiciens qui gesticulent que la Suisse n’a pas à baisser son pantalon et appellent à résister ont donc apparemment tout faux : ce futur là est en marche.

Une taxation plus efficace et plus égalitaire est plus juste pour tous ceux qui ne trichent pas. Le problème suivant se pose toutefois en ces termes – et n’est pas encore sur la table mais doit y venir : une hausse des recettes par une taxation plus efficace et plus égalitaire ne doit pas amener les Etats à dépenser plus. L’efficacité de la fiscalité doit se doubler de l’efficacité générale de l’Etat. Si les recettes augmentent parce que les tricheurs ne passent plus au travers du filet, la taxation doit baisser pour tous – corollaire du fait, injuste, que les tricheurs font augmenter la ponction sur ceux qui ne trichent pas. Quant à la Suisse dans ce paysage, l’initiative de M. Hiler de s’aligner vers le bas en matière de taxation des entreprises doit être louée et portée haut. Le dogme de la concurrence fiscale dommageable est pervers là où les Etats veulent à l’inverse une concurrence totale dans l’économie privée. Le péril est de s’aligner constamment à la hausse en matière fiscale – atteignant les seuils auxquels la fiscalité tue l’économie en empêchant le profit, l’épargne et l’investissement. L’avenir d’une fiscalité efficace doit se doubler de la fixation politique de seuils de dépenses, budgétaires et de ratios de prélèvements – et à l’Etat de faire avec.