
Pas de droit de la concurrence pour les troubles érectiles, pas d’Al Qaida et de Hezbollah aux Caraïbes, et faire un procès pour prouver qu’on est vivant – les quelques absurdités (juridiques) du dimanche soir
Bien sûr un jugement d’un tribunal doit se lire dans son entier, le droit possède des conditions formelles, techniques, un arrêt peut-être plus sensé que sa conclusion ou sa relation par la presse. Mais l’arrêt du Tribunal administratif fédéral du 3 décembre 2013 dans l’affaire Viagra/Levitra/Cialis n’a pas manqué de faire sourire – et pleurer quant à la réalisation du droit de la concurrence en Suisse, pays de haute tradition cartellaire. Ainsi la Comco n’a-t-elle pas assez examiné l’impact du « facteur honte » en sanctionnant Pfizer, Eli Lilly et Bayer dans la fixation des prix par recommandations de ces trois médicaments contre les troubles érectiles. Conclusion ainsi littérale et raccourcie : en droit suisse, le droit de la concurrence ne s’applique pas aux produits qu’il est honteux d’aller acheter. Des produits qu’il est « honteux » d’aller acheter, il y en a beaucoup… Et il est honteux que le TAF énonce qu’il s’agirait d’un « facteur honte » – alors que des publicités génériques passent à la télévision en montrant un couple de beaux (comme toujours à la télévision) sexagénaires invités à en parler à leur médecin – d’un dysfonctionnement érectile. Ni honteux ni n’en ayant l’air. Une maladie peut être honteuse dans le langage populaire. Dans un arrêt du TAF et celle-ci, c’est un vilain dérapage ainsi que pour le droit de la concurrence.
Next, dans le très sérieux Economist analysant le problème des nationalités de complaisance qui s’achètent dans des micro-Etats notamment des Caraïbes, apparemment cela attire des bandits. Scoop. Mais l’article ne donne qu’un ou deux exemples peu concluants en termes de prévalence. Et conclusion rassurante : les terroristes ne doivent pas le savoir car le (nécessairement très sérieux) rapport annuel du State Department américain dit qu’il n’y a pas de cellules actives connues d’Al Qaida ou du Hezbollah dans les Caraïbes. On est pas très étonnés mais très contents. Enfin, une Mme Haman de St-Louis Missouri a dû ouvrir action pour faire constater qu’elle est vivante. Apparemment une de ces agences/fichiers américains répertoriant le risque de crédit des gens l’a donnée morte. Et depuis c’est Kafka de service en service incompétent entre sa banque et cette agence pour faire établir que ce n’est pas le cas – son inscription sur le compte-joint de ses parents et le refinancement de ses hypothèques ayant été refusés ! Cette agence Equifax disant collecter l’information de, notamment, les banques, lesquelles s’y renseignent à leur tour, si le serpent se mord la queue, ça risque de mettre long. Heureusement qu’il y a un Fair Credit Reporting Act qu’elle peut actionner devant une Cour fédérale – et espérons qu’elle ait des tas de dommages-intérêts !