Quelles conséquences lorsque la banque conserve des documents bancaires au-delà de son obligation légale de les conserver dix ans ? Eléments de réponse dans une décision de la CFB/FINMA de 2008

Posté le 28 octobre, 2009 dans droit / law

La question se pose fréquemment en pratique : une banque doit-elle remettre à son client des pièces relatives à son compte datant de plus de dix ans, délai légal de conservation des pièces comptables, lorsqu’elle les possède encore c’est-à-dire n’a pas fait usage de son droit de les détruire ? De nombreuses banques conservent en effet les relevés de comptes et écritures bancaires dans leur système informatique au-delà des dix ans – mais leurs réponses sont variables. Certaines les remettent – puisqu’elles existent. D’autres s’y refusent, par principe, lorsque cela les arrange, ou lorsque la demande pourrait être liée à l’invocation d’une possible responsabilité à leur encontre. Le motif invoqué est alors que le délai légal de conservation est de dix ans, voire celui de la prescription contractuelle décennale. Ces réponses sont rarement juridiquement satisfaisantes ou convaincantes. Une décision de la CFB dans son Bulletin (51) 2008 p. 70, résumée dans la RSDA 4/09 p. 288, apporte quelques débuts de réponse – sur un plan administratif et pénal – mais également quelque trouble.

La CFB rappelle tout d’abord le délai de 10 ans de l’art. 962 al. 1 CO lequel court de la fin de l’exercice au cours duquel les « inscriptions » ont lieu. Il vise les « écritures ». Les documents dits « de base », essentiellement les documents contractuels et d’ouverture de compte, doivent eux être conservés dix ans après la fin de la relation (ce qui est logique – personne ne verrait une banque détruire les documents d’ouverture au motif que la relation dure depuis plus de dix ans). Comme la décision concernée a trait à la procédure administrative contre une banque pour n’avoir répondu dans un délai adéquat aux autorités pénales, la CFB évoque ensuite, outre les règles administratives d’organisation d’une banque, l’art. 7 LBA imposant distinctement du CO la conservation des documents dix ans après la fin de la relation ou des transactions – à fin de disponibilité pour l’autorité pénale. Première réflexion : il est des cas d’infractions, et le cas grave du blanchiment, dans lesquels la documentation peut être détruite après dix ans en conformité de 7 LBA mais la prescription pénale pas encore acquise.

La CFB évoque ensuite la situation des comptes en déshérence. La documentation « y compris les transactions » doit être conservée jusqu’à la remise des avoirs à l’autorité compétente ou à la reprise des contacts avec le client. Deuxième réflexion : le client qui est en contact régulier avec la banque est moins protégé que celui qui n’en a plus.

Puis, conclusion, au point (44), la CFB expose que si la banque n’a pas fait usage de son droit de détruire les documents après dix ans, elle doit alors conserver son aptitude à les produire à l’autorité pénale au regard de l’art. 7 LBA. Cette solution est probablement juste – mais son ancrage dans l’art. 7 LBA peut sembler discutable. Les relevés antérieurs à la période de conservation obligatoire, s’ils existent, sont des éléments matériels. S’ils existent et sont susceptibles de servir de preuve d’une infraction pénale, ils sont saisissables à ce seul titre. Le fait que la banque aurait été en droit de les détruire, ou que le client ne serait lui-même plus en mesure de les demander au plan civil le cas échéant, n’est un obstacle ni à leur saisissabilité ni à leur usage au plan pénal.

La CFB a voulu viser que si la banque conserve des documents au-delà du délai légal, elle doit continuer à assurer leur détention de la même manière qu’auparavant et/ou qui permette de les retrouver en cas de requête de l’autorité pénale au sens de l’art. 7 LBA. Cela est également légitime au plan administratif. Il est moins sûr que l’art. 7 LBA l’impose et les documents restent saisissables quoi qu’il en soit au plan pénal.

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