ON EN PEUT PLUS DE LA CRAVATE – ET LE CLASSEMENT A VENIR DES MEILLEURS AVOCATS !

Posté le 24 novembre, 2016 dans avocats / advocacy

Sujet « magazine » pour commencer – gros coup de dress down dans la profession, ici et ailleurs. A voir les quidams en ville ou dans les bureaux, ne portent plus complet et cravate que ceux qui le doivent par code ou par obligation. Et du coup souvent banals, moches ou démodés. Un beau complet et une belle cravate, ou des bretelles, restent élégants voire magiques – comme Frank Galvin dans The Verdict. Leur devoir quotidien les affligent. Plus personne n’en peut plus et le col ouvert s’est imposé. Les pays et cantons qui imposent la robe avaient déjà accouché de débraillés sous celle-ci, magistrats compris. Quinze ans après la bulle Internet qui avait fait des tycoons de nombreux geeks en jeans au milieu du derrière et sweat hoody, avant que son éclatement ne les fasse se rhabiller, tant pis tant mieux. Le Temps et Bilanz ont lancé un grand sondage pour révéler un classement des meilleurs cabinets d’avocats de Suisse. Alléluia. Les résultats seront ensuite envoyés aux 1000 plus grandes entreprises de Suisse (gratuitement – mais cela générant des annonces). L’institut indépendant allemand Statista a été mandaté pour le mener. Le sondage portera sur 6’500 avocats dans 2’000 cabinets, et sera fondé sur les réponses de trois groupes-cibles : clients, juristes d’entreprise et avocats eux-mêmes. C’est la mode des classements – et pas étonnant qu’il n’y échappe de vouloir « classer » les avocats. Mais cela reste un exercice commercial. Questionné sur la méthodologie et le risque de distorsion de concurrence qui peut résulter d’un tel exercice, Statista a mis en avant le nombre de sondés et de réponses attendues, et l’impossibilité de recommander son propre cabinet. Par transparence, la méthode sera également publiée avec le palmarès.

Si cela semble un peu plus sérieux que le business biaisé des annuaires payants anglo-saxons frisant le pénal en exploitant flagornerie et vanité, l’exercice pêche à plusieurs égards. Au sein des trois groupes-cibles, chacun des clients, juristes ou avocats ne connaît directement et professionnellement qu’un nombre limité de praticiens, et certainement pas dans 30 spécialités. Impossible de noter fiablement son médecin – sauf subjectivement ou s’il a commis une faute avérée ou vous a sauvé donné pour perdu. Difficile de noter telle compagnie aérienne sans avoir volé sur plusieurs autres. Pour ceux que les sondés connaissent, le résultat sera donc qualitativement limitatif voire binaire. Même un grand nombre de réponses ne remédiera donc pas, même par répétition de certains noms, à l’étroitesse de l’échantillonnage. Distinctement, les grands cabinets ont tendance à travailler en vase clos, c’est-à-dire les uns avec ou contre les autres, ce qui croisera les résultats en leur faveur. De même que la routine ou la quasi-obligation des entreprises d’une certaine taille de travailler avec ces cabinets – plutôt que d’optimiser leur choix auprès de spécialistes plus ciblés mais plus petits. Bref, chacun ne connaît que ses amis ou ceux avec qui il travaille – ce qui vicie l’exercice dont le résultat n’aura vraisemblablement aucune valeur. La qualité d’un avocat participe de trop de critères – écoute, confiance, intelligence émotionnelle, compétences, expression, culture, expérience, détermination, etc. – pour être convenablement ciblée par un sondage général en six questions. Et d’où la distorsion de concurrence qui en résultera.

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