Il y avait Good-Bye, Lenin. Les rumeurs bruissent maintenant d’un possible départ de la FIFA de Suisse. Le canton de Vaud a récemment souligné, pour justifier des faveurs ou une situation fiscale préférentielle, les « retombées », estimées en milliards, de la présence des fédérations sportives en Suisse. Le problème est que l’argument ne tient pas : de nombreuses entreprises commerciales pourraient demander des exonérations et privilèges au même motif qu’elles génèrent des « retombées ». Les grandes fédérations sont des entreprises commerciales importantes. Le sport peut être considéré comme un but idéal mais l’aspect commercial demeure prépondérant. De là, il n’y a pas de justification, et il est inéquitable, qu’elles soient traitées de manière préférentielle par rapport à d’autres acteurs de l’économie. Hypocrisie qu’il faudra bien résoudre un jour – et le fait que d’autres États accordent les mêmes privilèges étant une mauvaise réponse.
Certains ne pleureraient pas que des fédérations ayant des mœurs ou une gouvernance problématiques s’en aillent, et cessent ainsi de jouir d’avantages particuliers et des conditions-cadres de notre pays. D’autres considèrent que malgré certains aspects critiquables, qu’elles demeurent Suisse, soit dans un État de droit, les fait évoluer dans le bon sens. Ce qui ne sera pas, ou moins le cas, selon où elles déménagent. La Suisse a créé un cadre juridique sportif de qualité : l’institution du TAS est une condition-cadre importante unique au monde, et que les fédérations soient régies par le droit suisse a permis l’amélioration de leur gouvernance et créé une cohérence pour le monde du sport.
Au plan judiciaire, l’enquête pénale suisse contre la FIFA, par une lenteur traditionnelle et les carences graves du MPC, n’est encore presque nulle part – alors qu’elle est terminée-jugée-paquetée aux États-Unis (où notamment, Julius Baer a payé 80 millions de dollars pour avoir participé à des activités illicites). Un départ vers un autre pays hôte comporte beaucoup de compartiments qui ne sont pas toujours ceux que l’on croit. Pas sûr que la complexité administrative française, la volatilité de son droit fiscal ou l’indépendance et l’opiniâtreté de ses juges d’instruction, attestée en matière de dopage cycliste par exemple, soient préférables à la douce quiétude suisse. Pas sûr que le déficit d’État de droit, ou en matière de droits de l’homme, du Qatar ou autres soit compatible avec les exigences que la société civile et leur propre clientèle forcent ses sponsors à accepter. A suivre assurément.