Un politicien décide de soutenir un autre candidat à une élection, ou rejoint un autre gouvernement ou cabinet : ce devrait être une chance, et loué, ou accepté comme son choix – mais non, c’est un traître. S’opposer à l’avortement ou au mariage homosexuel ? Parce que c’est ma foi. Posséder une arme ? Parce que ce sont mes valeurs. Vénérer l’armée ? Parce que je suis patriote. Ne pas me vacciner ou porter de masque ? Parce que c’est ma liberté. Or ce ne sont que des opinions. Et des opinions, cela évolue, on peut en changer. Les enfermer dans le prétexte de son identité, évidemment, l’empêche.
Ce glissement de l’opinion vers l’identitaire tue le débat. Libère de son libre arbitre et de ses insécurités. S’inscrit dans l’appartenance, le clan – rassurant et protecteur. Or figer les conceptions et les opinions sous couvert de son identité est dangereux. La société avance parce que les opinions varient, évoluent avec elle, se confrontent et se discutent – pacifiquement. Et par leur diversité, et son étendue. L’objectivité, l’ouverture, le respect et la tolérance sont les réquisits d’une société libre et démocratique, mais qui sont fragiles.
Lorsqu’une logique identitaire raciale, ethnique, religieuse, nationaliste ou politique prend le dessus, l’autonomie de la volonté s’efface face à ce que veulent d’autres ou le groupe. Lorsque certains sujets sont tabous, interdits, bannis, censurés, en famille, en société, à l’école ou en politique, cela a des conséquences. Le pouvoir est confisqué par une minorité dictant ce déguisement identitaire des opinions – et la société est perdante. C’est du débat libre des choses fausses que s’affirment les choses vraies – et le progrès social. L’identitarisme est un vrai péril, et sournois.