Les lobbies sont toxiques vu la distorsion qu’ils impriment sur le fonctionnement de la démocratie. Mais pourquoi serait-il toxique qu’un secteur économique explique et défende ses intérêts – dans un monde libre, un État de droit, et la liberté d’expression étant garantie ? D’abord, l’argent. Celui qui permet d’acheter ou de produire de l’exposition médiatique – que les ONG et la société civile n’ont pas. L’argent qui finance des partis, parfois de tous les bords, qui les empêche de mordre, ou de mordre fort, la main qui les nourrit. L’influence ensuite, celle qui prévarique les élus, les prive de leur libre arbitre et d’agir en conscience. L’argent et l’influence conjugués font ou défont les scores électoraux – et donc les carrières politiques. Les ambitions et l’égo des politiciens, particulièrement des hommes, y sont nécessairement assujettis. Le lobby des armes, par sa puissance économique et par l’électorat du 2^ème amendement qu’il mobilise, est insurmontable pour un Républicain Américain. Il paralyse toute réforme – un Républicain n’étant jamais élu ni réélu sans cette portion des votes même si la majorité, y compris Républicaine, y est favorable. La distorsion est visible et le phénomène se répète avec les lobbies de l’automobile, de la viande, du sucre, des armes, du pétrole, etc. Pas pour rien que la délégation la plus importante à la COP26 était celle des… lobbies.

Il n’en va pas différemment en Suisse. La réduction des émissions de CO2 et la protection de la biodiversité coûte, cher et directement, aux secteurs automobile, pétrolier et gazier, agro-alimentaire et grande distribution, chimique, pétrochimique et pharmaceutique, paysan et du bâtiment/travaux publics. Cela fait du monde ayant à perdre économiquement de cette lutte. Réalise-t-on l’ampleur colossale de leur poids conjugué qui leur permet de freiner ou paralyser insidieusement la transition en coulisses ou ouvertement ? Réalise-t-on leur poids financier et politique sur les élus, les partis, les cantons, le parlement, le gouvernement, et la propagande qu’ils peuvent s’offrir ? La société civile et le monde associatif ont aussi leur liberté d’expression mais ne pourront jamais régater. La toxicité des lobbies est leur fonctionnement mafieux : vous êtes avec nous, ou sans nous vous n’êtes plus. Les solutions existent – dont interdire les lobbies et le soutien financier de l’économie à la politique. L’argument très suisse que « ce n’est pas si simple que cela » suivi d’une litanie d’arguments prétextes tous facilement démontables ne se fait jamais longuement attendre. Mais il faudra le faire. Après qu’il ait été trop tard ?