Mais bon sang quel problème les autorités judiciaires et administratives suisses ont-elles avec le droit de réplique – et in fine avec l’article 6 ?!?

Posté le 17 novembre, 2013 dans justice

Bien sûr l’arrêt 2C_22/2013 publié in SJ 2013 I 547 est-il cadré et bien appuyé sur de la jurisprudence établie : une autorité administrative ayant pour tâche de défendre l’intérêt public n’est pas un tribunal, le droit d’être entendu ne porte pas sur un préavis interne à l’autorité administrative ayant rendu la décision, et de toute manière l’effet dévolutif complet du recours à la Cour de justice a guéri ce vice si vice il y avait eu. Le droit à la réplique et à prendre connaissance du dossier ne s’applique que devant l’autorité judiciaire, pas l’autorité administrative. Exit donc ce recourant mal inspiré et ses histoires de réplique et de violation de ses droits. Le problème de cet arrêt n’est pas pourtant sa motivation au plan technique – mais qu’il s’inscrit dans une trop longue série et dans une mentalité qui tout simplement n’aime pas la réplique et fait tout pour l’exclure. En Suisse les autorités judiciaires ou non n’aiment pas le débat qui sort du cadre demande/réponse. Chacun dit ce qu’il a à dire une fois, et on peut trancher. Le verbiage ou simplement argumenter énervent, font perdre du temps, le Suisse ne les aime pas et est mal à l’aise avec eux, et les considère largement inutiles. Partant et de fait, tout ce qui peut donc être fait pour tuer la réplique est fait – de la résistance active à la résistance passive. Et c’est bête, inutile et dommageable – car le problème n’est pas là. … suite

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Adapter le taux de l’usure au taux du marché en temps réel ? – et l’insolente entrée en bourse de l’ex-GE Money Bank

Posté le 12 novembre, 2013 dans actu / news

Ainsi Cembra Money Bank, encore GE Money Bank il y a peu, vient de lever un milliard de francs ! lors de son entrée en bourse. Votre sac à main, des vacances de rêve ou votre télévision plate de suite – à un taux d’intérêt de 9-10% : cette campagne d’affichage de goût discutable a été vue par chacun dans toutes les villes de Suisse. Pas étonnant que les investisseurs se pressent au portillon d’un fonds de commerce qui prête à 10% (entre 9,95 et 14,5% en fait) et se refinance actuellement littéralement à zéro. Il y a plein de certes et de bien sûr valant cautèles à la critique. UBS et le CS, et d’autres banques, prennent aussi 12,5% d’intérêt débiteur sur un compte personnel retail. Les offres varient dans une fourchette assez large : de 5,9% en ligne à la Banque Migros aux 13,95% de crédit-direct et 14,5% de Cembra. L’autonomie de la volonté principe cardinal du droit des contrats et la liberté/responsabilité personnelle. Le droit n’est pas là pour protéger les imprudents ou les imbéciles contre tout et tout le temps. Il y a la Loi sur le crédit à la consommation. Des assurances défaut. Et le débat de société a donc déjà eu lieu s’agissant de l’utilité ou nécessité pour certains de pouvoir accéder à un crédit même cher, et du besoin de l’encadrer par une protection du consommateur. Après tout si quelqu’un veut payer son sac à main ou sa télé 110% du prix pour l’avoir tout de suite, c’est son affaire et pas très intéressant. C’est même utile à l’économie – même si le domaine a été cadré juridiquement pour ses problèmes et dérapages et non bien sûr les cas non-problématiques. Il n’y a donc rien à voir et circulez, ni sur le le principe ni sur les taux ?  … suite

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Avocat-bashing – un sport à la mode mais de leur inutilité pour l’économie et la faute aux facultés de droit ?

Posté le 6 novembre, 2013 dans avocats / advocacy, finance / eco

L’avocat est de tout temps comme l’arbitre en foot : une moitié du stade le hait parce qu’il défend l’adversaire – mais chacun s’y accroche quand il en a besoin… C’est même pour certains un snobisme ou un power game : je vais vous envoyer mon avocat et vous allez voir ce que que vous allez voir, sous-entendu c’est le meilleur – ou le plus cher. Mais tout cela est du cinéma ou du café du commerce – tant le vocable recouvre en fait des pratiques différentes. Dans le bashing actuel les avocats sont néanmoins désignés responsables du blocage budgétaire aux Etats-Unis. Certes ils considèrent généralement que les leurs cessent rapidement de l’être quand ils deviennent politiciens mais de fait, pourtant, neuf sur dix des acteurs du blocage puis déblocage budgétaire aux Etats-Unis sont des avocats, pour un tiers au Congrès et plus de la moitié au Sénat – pour un pour deux-cent dans la population. Au Canada c’est un sur sept et en France un sur quinze. Et cela ne date pas d’hier – une moitié lors de la Déclaration d’Indépendance. En Suisse c’est entre-deux : trente juristes sur deux-cent au National. Autre illustration de ce bashing, le discours du Bâtonnier genevois à la dernière assemblée générale de l’Ordre a relevé, comme nombre de ses prédécesseurs de tous temps, la solitude de l’avocat, face à son client, sa conscience et ses décisions, le désamour opportuniste qui le frappe souvent, mais sa fierté de l’être – profession debout envers et contre tous. Bref rien de nouveau – mais au-delà de ces politiqueries et complaintes, l’avocat est-il utile à l’économie, entendez par-là fournit-il les prestations que lui demande l’économie ? … suite

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Copenhague : Borgen, Christiania, The Killing – et si les scénaristes connaissaient tout le code pénal

Posté le 2 novembre, 2013 dans divers

Copenhague. Ce Danemark des pays nordiques qui ont la cote : une économie stable et innovante, une criminalité basse, des impôts élevés mais des prestations et une cohésion sociales élevées, et des régimes politiques démocratiques et efficaces. Et surtout des finances publiques équilibrées. Pas nécessairement très fun pour certains – mais le paradis en comparaison du reste de l’Europe. Ce blog a aussi déjà extrapolé le lien religieux et sociétal sur la maîtrise des finances publiques entre les pays réformés du nord et leur incapacité sur ce plan des pays catholiques du sud. Dans ce Danemark moderne le « vieux » quartier alternatif de Christiania, encore visité comme une réserve d’Indiens par les touristes. « Bienvenue en enfer » était-il écrit sur le panneau de… sortie de retour vers la ville. Tristounet aujourd’hui Christiania. La ville resplendit de son dynamisme et de son design, et Christiania est plus un terrain vague graffité que l’idéal du village hippie autogéré dans la joie et les rapports humains supérieurement profonds et détachés du matériel. Les stands de cannabis, en fait un véritable petit marché, ne sont pas davantage l’aboutissement de la lutte libertaire des hippies pour vendre et consommer librement une substance qui leur fait plaisir, cimente leurs rapports sociaux, et n’est pas plus dangereuse que l’alcool – drogue officielle. Ils sont visiblement tenus par des gangs musclés et bien peu Danois qui exploitent la tolérance envers cet ex-écoquartier expérimental. Un véritable service d’ordre patibulaire monte discrètement la garde, que les touristes déambulant béatement en admirant cette tolérance ne remarquent même pas. Et ce qui rappelle que la seule voie en termes de légalisation est plutôt celle de l’Uruguay que de laisser des gangs commercer. … suite

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La Suisse enfer fiscal – et autres salades sur le sujet

Posté le 26 octobre, 2013 dans actu / news

Les questions de fiscalité auxquelles la Suisse est confrontée au plan international ou intérieur sont une grande salade. Des pleurnichages de la place financière au nouveau parti bourgeois démocratique dont l’un des arguments aux élections cantonales était de créer un fonds de cent millions pour les entreprises (ayant vite compris que le politicien populaire est celui qui dépense l’argent des autres), il y a vraiment de tout. On ne pleure jamais pour les plus riches que soi mais la Suisse est un enfer fiscal – pour certains. Un avocat indépendant marié ne sortant pas de la classe moyenne supérieure atteint avec l’AVS un taux de prélèvements directs de 51%. C’est trop. La formule selon laquelle il travaille jusqu’au 30 juin pour payer les frais généraux, salaires, loyer et infrastructure, jusqu’au 30 septembre pour l’Etat, et du 1er octobre au 31 décembre pour lui, est malheureusement vraie. C’est excessif et injuste – eu égard à certaines autres situations. Cela explique en une phrase pourquoi le forfait fiscal est condamné : cela énerve de payer plus que le voisin au forfait plus riche que soi. A fortiori qu’il a distordu le marché immobilier en pouvant payer, avec son économie d’impôts, une prime que le marché ne justifie pas et que le contribuable ordinaire ne peut pas payer. Les rulings fait à certaines entreprises procèdent de la même injustice. Genève est pour les autres déjà à la limite supérieure quant à la motivation que le rapport entre charges et prestations doit entretenir dans l’économie privée. Pour le reste il est amusant que trois des derniers véhéments pourfendeurs du secret bancaire suisse soient rattrapés par la mauvaise fortune : comme d’Amato avant eux, Sarkozy est empêtré dans plusieurs affaires judiciaires dont de financement, son laquais M. Woerth pire encore, et Peer Steinbrück est poussé sans gloire vers la sortie. Il doit y avoir une malédiction à s’attaquer à la Suisse. … suite

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Accès électronique à la justice pénale : L’Angleterre y est – pas nous

Posté le 17 octobre, 2013 dans justice

A l’heure à laquelle le Tribunal fédéral est opposé à la retransmission des délibérations… publiques (de manière difficilement compréhensible), à l’heure à laquelle l’avocat d’un prévenu genevois doit encore aller sélectionner au greffe avec des post-it les documents du dossier dont il doit demander des copies physiques à un huissier qu’il recevra par la poste, l’Angleterre met en place elle ses accès numériques à la justice pénale. Certains fronceront un sourcil : hou ça doit être cher, compliqué, quid de la sécurité, comment gérer tout ça ? Le bon vieux dossier papier ya rien de tel et au moins, on sait ce qu’on fait et qui fait quoi. Sauf quand ils sont volés ou disparaissent comme en France un temps dans les affaires politiques ou de banditisme corse. Ca oui, quand un dossier physique disparaît, le prévenu est souvent tiré d’affaire. Outre cette annonce et les réactions les faits : d’ici à 2016, 500 salles d’audience seront équipées du wi-fi, les auditions de témoins pourront avoir lieu par vidéo depuis des postes de police, les dossiers seront entièrement numériques et les preuves entièrement numérisées et affichées sur écran en audience, et les policiers rédigeront leurs rapports sur le terrain sur des smartphones directement connectés plutôt que sur leurs séculaires calepins. Les victimes pourront, elles, suivre en ligne l’évolution de l’enquête. Les inculpations auront lieu par avis postal dans certaines affaires, notamment de circulation. Mais combien ça coûte et qu’est-ce que ça rapporte ? … suite

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Greenpeace et Qatar : Pourquoi le foot doit-il toujours être politiquement incorrect ? – et si la FIFA et le FC Bâle donnaient raison à Greenpeace et aux ONG – pour une fois ?

Posté le 11 octobre, 2013 dans sport / sportlaw

A Bâle, des activistes de Greenpeace se suspendent au toit du stade St-Jacques pendant une rencontre de Coupe d’Europe, pour protester quelques minutes contre des dégâts écologiques de Gazprom – sponsor important du football. A Zurich, des ONG protestent devant la FIFA contre l’esclavagisme grâce auquel le Qatar prépare la Coupe du monde. Dans leurs rôles respectifs, le FC Bâle dépose plainte pénale contre Greenpeace et parce qu’il risque des sanctions disciplinaires pour cette perturbation d’un match, et la FIFA dit qu’elle ne peut « s’ingérer » dans le « droit du travail » d’un Etat souverain. Magnifique exemple d’attitudes formelles et d’apparence formellement cohérente – mais au contenu pleutre et socialement déficient et, ce qui est plus grave, socialement dommageable. Le postulat que le sport ne doit pas faire de politique n’est pas dénué d’un certain sens. Il y a tant de problèmes en ce bas monde que s’il est pris en otage et interrompu par les activistes de chaque problème social ou politique, il sera rapidement asphyxié. Il possède un droit civil à ne pas être perturbé même en tant que simple spectacle. L’absence des clans respectifs aux Jeux de Moscou puis de Los Angeles à la fin de la Guerre froide a été dans cette ligne une tristesse et un échec pour le sport, les sportifs et les pays. Il y a toutefois un bémol et une différence : les problèmes dénoncé par Greenpeace à Bâle et les ONG à Zurich sont en lien avec le football –  vu que les Etats et les entreprises, comme le Qatar et Gazprom, s’y associent pour en retirer un bénéfice d’image ou comme vitrine politique et sociale. … suite

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Affaire Madoff : Au-delà de celui des enablers le procès des complices – et son impact dans ceux des feeders ?

Posté le 7 octobre, 2013 dans actu / news, finance / eco

Madoff est en prison pour encore 146 ans mais la question demeure : comment a-t-il pu faire ça tout seul, et a-t-il réellement fait ça tout seul ? Au-delà de la profession que cela ne peut pas être possible, quels faits et quelles certitudes – ou inconnues – y a-t-il à ce jour ? Ceux qui ont déjà été condamnés pénalement, par des plaider coupable, les enablers, l’ont été pour des infractions pénales annexes mais nécessaires : essentiellement des faux dans les titres, dans la comptabilité et faux rapports à la SEC, mais pas pour participation consciente et volontaire à la fraude. Pour ceux qui en sont accusés mais qui le contestent, l’épreuve commence demain, soit leur procès – parce que précisément ils contestent avoir su et voulu. A l’accusation un témoin clé ayant avoué et collaborant pour atténuer sa peine à venir (jusqu’à 125 ans de prison) : Frank DiPascali, son ancien bras droit. Tout cela présente-t-il un intérêt cinq ans plus tard ? Oui pour diverses raisons. La première est de savoir une fois pour toutes si Madoff a agi seul ou non dans le coeur de sa fraude comme il l’avait affirmé. La seconde est de comprendre comment en termes opérationnels, c’est-à-dire de logistique et de contrôle dans un monde régulé, un ou plusieurs hommes font disparaître 17 milliards d’avoirs confiés, en les ayant fait fictivement fructifier à 65 et ayant tenu des milliers de comptes sur la base de données fausses de toutes pièces – sachant qu’un ponzi scheme est une fraude rudimentaire et séculaire : rembourser aux uns leurs profits et/ou leur capital avec celui des suivants. La troisième est de  comprendre comment dans un environnement régulé et des marchés électroniques publics (même si une partie des transactions, celles sur options, étaient OTC), ce groupe a pu tromper clients et professionnels – dépositaires, banques et feeder funds – soit déjouer tout contrôle ou toute réconciliation simples qui auraient fait tomber l’édifice. … suite

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Le brouillard juridique des grandes oreilles – et autres délires numériques

Posté le 1 octobre, 2013 dans actu / news

Cacophonie puis retour aux affaires courantes plus ou moins sans autre après chaque épisode d’indignation médiatique et momentanée sur les histoires de grandes oreilles, entendez par-là la NSA, l’espionnage des communications et du net par les gouvernements et autres Watergate d’aujourd’hui. L’indignation et la préoccupation sont à l’image du monde actuel et de ses news : éphémères, sans suites, ça s’essouffle et devient lassant à force, et on passe à autre chose – jusqu’à la prochaine fois. Les lampistes trinquent dans l’intervalle – Manning, Snowden et consorts -, les messies – Assange, Domscheit-Berg et Cie – prêchent dans le désert, et tout cela avec les incohérences et les récupérations liées au fait que le débat n’est pas correctement posé. Qu’est-ce que le Big Data et qui le définit-il juridiquement, qu’est-ce qu’un hacker « éthique » – et cela existe-t-il ?, la NSA est-elle pire que son homologue russe ou de pays arabes totalitaires – dont personne ne parle, la Suisse doit-elle vendre du matériel d’espionnage à des états non-démocratiques, la cybersurveillance est-elle dangereuse, illicite – ou justifiée pour lutter contre le terrorisme ? etc. etc. Les livres des Assange de service sont franchement incompréhensibles et dépeignent une menace épouvantable sur fond de complot mondial – mais totalement intangible sinon en termes philosophiques. Il est réfugié à l’Ambassade d’un pays qui n’est pas un chantre des droits de l’homme mais un ennemi naturel de celui qu’il a exposé. Comme Snowden à Moscou. Et on continue de s’étrangler au nom d’informatique et libertés quand le fitness du coin stocke des données personnelles, ça c’est tangible et on sait auprès de qui râler – pendant que Big Brother continue tranquillement à suivre tout ce que nous disons. Bref ça nous mène où tout ça ? … suite

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† Bernard Corboz

Posté le 25 septembre, 2013 dans actu / news

Chaque élève pendant sa scolarité, chaque professionnel dans son industrie, chaque avocat a eu ses maîtres. Tel professeur charismatique, maître de stage didactique, associé protecteur ou autres muses et conseillers des moments vrais. Bernard Corboz était pour nombre d’entre-nous une icône. Savoir qu’il était dans la composition saisie de son recours au Tribunal fédéral rassurait. Rarement avocat a-t-il eu le sentiment de ne pas être d’accord avec un arrêt qu’il rendait. Bernard Corboz était un personnage spécial. Formel et diablement précis dans son langage – mais laissant transparaître humour, humanité et sens des réalités. Assez austère d’apparence mais plus détendu, aimable et accessible que l’habit ne le laissait penser. Mais surtout quel juriste ! Il possédait une extraordinaire perception du droit et de l’ordre juridique, du général au particulier. Avec la formidable capacité dans toutes les matières, du droit de fond à la procédure, d’exprimer, par écrit comme par oral, avec la clarté de l’art poétique : Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément. Bernard Corboz était impressionnant dans sa capacité à expliquer, à restituer le droit, à rendre simple ce qui est difficile, à rendre compréhensibles, logiques ou justes des considérations compliquées. Là où d’autres font simplement bien leur travail, il a marqué, façonné et tenu de larges pans de la jurisprudence du TF, veillant à sa cohérence, corrigeant ce qui n’allait pas, et le rendant acceptable par l’explication. Il a été un immense gardien de notre ordre juridique – mais avec en plus la vision qui fait les personnages ayant marqué aussi leur temps : la vision du droit, de la société, de l’avenir, de leurs évolutions. L’annonce de sa disparition est un choc. Merci d’avoir fait autant et si bien pour le droit, la Justice, in fine l’Etat de droit et la société toute entière – dans ce rôle obscur et ingrat qu’occupe la justice. Vous nous manquerez. On va faire comment maintenant pour comprendre ?

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