La quête de justice est perpétuelle, inextinguible, même si parfois obsédante, mais… juste, nécessaire, gratifiante. Dans le monde tout va globalement et fondamentalement mieux – mais avec chaque jour ses quêtes ou re-quêtes de sens. Toujours bien de relire quelque Lumière : La notion de quelque chose de juste, me semble si naturelle, si universellement acquise par tous les hommes, qu’elle est indépendante de toute loi, de tout pacte, de toute religion. Que je redemande à un Turc, à un Guèbre, à un Malabare, l’argent que je lui ai prêté pour se nourrir et pour se vêtir; il ne lui tombera jamais dans la tête de me répondre, Attendez que je sache si Mahomet, Zoroastre ou Brama ordonnent que je vous rende votre argent. Il conviendra qu’il est juste qu’il me paie; et s’il n’en fait rien, c’est que sa pauvreté ou son avarice l’emporteront sur la justice qu’il reconnaît. … L’idée de justice me paraît tellement une vérité du premier ordre, à laquelle tout l’univers donne son assentiment, que les plus grands crimes qui affligent la société humaine, sont tous commis sous un faux prétexte de justice. Le plus grand des crimes, du moins le plus destructif, et par conséquent le plus opposé au but de la nature, est la guerre; mais il n’y a aucun agresseur qui ne colore ce forfait du prétexte de la justice. Les déprédateurs romains faisaient déclarer toutes leurs invasions justes par des prêtres nommés féciales. Tout brigand qui se trouve à la tête d’une armée, commence ses fureurs par un manifeste, et implore le dieu des armées.
… Le mot d’injustice ne se prononce jamais dans un conseil d’Etat, où l’on propose le meurtre le plus injuste; les conspirateurs, même les plus sanguinaires, n’ont jamais dit: Commettons un crime. Ils ont tous dit, Vengeons la patrie des crimes du tyran, punissons ce qui nous paraît une injustice. En un mot, flatteurs lâches, ministres barbares, conspirateurs odieux, voleurs plongés dans l’iniquité, tous rendent hommage, malgré eux, à la vertu même qu’ils foulent aux pieds. Voltaire croyait donc la justice un sentiment universel même s’il lui concédait une certaine fluctuation des contours. Au XXIème siècle, même se déclarant encore ignorant après avoir lu les philosophes, Voltaire apparait rassurant. Et il a eu raison : tout n’a jamais fait qu’aller mieux depuis 1766 – même s’il y a eu des cahots. Les problèmes de fond n’ont pas beaucoup changé. Continuons. Ya encore du boulot. Ils devraient peut-être le lire.